Sa famille arrive en Dordogne après que le ministère de l’agriculture ait engagé une campagne de repeuplement des campagnes périgourdines. Le Périgord est un pays riche du point de vue des Bretons : la vie y est moins rude qu’en Bretagne. Son père visite une ferme d’une quarantaine d’hectares à Bussière-Badil qu’il choisit pour s’installer : en 1928 la famille Le Cam, son matériel et ses animaux sont transportés par voie ferrée jusqu’à Varaignes. L’accueil de la population périgourdine a été chaleureux, bien que les enfants furent surnommés les « Bretous ». En 1936, la ferme est reprise par ses anciens propriétaires et la famille s’installe dans le bourg de Bussière-Badil puis à Ruelle sur Touvre en Charente, ville ouvrière.
Les évènements politiques nationaux ou internationaux sont connus de la famille avec la lecture du Courrier du centre, acheté le jour du marché. Son père, proche des partis de la gauche, n’est cependant pas militant, et ne fait pas état de ses convictions politiques. À Ruelle sur Touvre Louis Le Cam constate dans la population ouvrière les fruits de l’arrivée du Front Populaire : la tenue vestimentaire change, les congés payés favorisent l’apparition de vélo tandems. Mais la montée du fascisme et du nazisme n’est pas spécialement suivie : toutefois, le père de Louis Le Cam, ancien combattant, a une grande méfiance envers Hitler et l’Allemagne.
À la déclaration de la guerre, Louis Le Cam vient de quitter l’École normale et attend sa première affectation dans une classe. Bien que titulaire d’une préparation militaire supérieure il n’est pas mobilisé car il a été ajourné. Il est nommé à l’école de Marsaneix, et lorsque l’enseignant qu’il remplace est démobilisé, il obtient un poste à Saint-Pardoux-la-Rivière afin de se rapprocher de ses parents (qui résident en Charente). Puis à la rentrée 1940, il est nommé au cours complémentaire à Nontron. La défaite de juin 1940 le révolte, mais il s’efforce de ne pas faire transparaître ses sentiments. Dans un premier temps, il n’y a pas d’hostilité envers le maréchal Pétain : elle viendra plus tard avec l’immense propagande du régime de Vichy qui entre dans les salles de classe. Louis Le Cam précise que la population de Nontron réclamait la venue du maréchal Pétain, qui fut toutefois visitée par un de ses émissaires en 1942. C’est à cette occasion qu’un incident se produisit : le président de la Légion des combattants a apostrophé publiquement le directeur du collège qui ne s’était pas décoiffé durant les chants patriotiques. Louis Le Cam précise qu’il dissimulait ses sentiments anti-pétainistes, comme une grande part de la population. Mais les jeunes manifestaient parfois leur désaccord : au collège de Nontron lors de la levée des couleurs du samedi, de jeunes gens ont remplacé le drapeau par une vieille chaussette noire, provoquant la fureur du président de la Légion des combattants.
Louis Le Cam évoque les hommes qui ont fondé la Résistance dans la région de Nontron : Charles Serre et Raymond Boucharel, enseignant révoqué par Vichy. Le rôle de ce dernier était plus politique que militaire : il se chargeait notamment des contacts avec la population. C’est par son intermédiaire que Louis Le Cam, enseignant également, entre dans les groupes armés de la Résistance. Le chef militaire de la région Dordogne nord était Rodolphe Cézard, dit « Rac », officier d’artillerie. À Nontron, les fondateurs de la Résistance étaient également Maître Deprévaud notaire, et Gabriel Delage, fabricant de chaussures. La Milice constituait alors la principale opposition à la Résistance, mais Louis Le Cam précise que ses hommes n’étaient pas virulents d’un point de vue militaire. L’occupant était en revanche bien plus efficace : début 1944 un espion de la Gestapo s’était glissé dans les groupes de la Résistance, en se faisant passer pour un aviateur anglais parachuté. Démasqué rapidement il a été abattu.
Après le débarquement, Louis Le Cam est au poste de commandement du 1er bataillon de la Brigade Rac installé à l’école de Saint-Estèphe (canton de Nontron).
Mais le commandement du 1er bataillon faisant défaut, Rac missionne un ancien militaire, le commandant Dupuy en remplacement de Raymond Boucharel, usé par les mois d’organisation clandestine. Une organisation véritablement militaire prendra forme rapidement sous son commandement, avec des services constitués (logistique, transport, renseignement…). Un officier Anglais était présent pour assister militairement et organiser des groupes de Résistance. Des agents de liaisons sillonnaient la campagne, entre Rac et les compagnies jalonnant la région. Louis Le Cam précise que de nombreux Lorrains ont activement participé à la Résistance et assuré le commandement. Le 3e bataillon de la Brigade Rac était commandé quant à lui par un Périgourdin, René Tallet (dit Violette). Des soviétiques, déserteurs de l’armée d’occupation ont également apporté un concours précieux à la Résistance locale.
En juin 1944 la prison de Nontron qui détient des personnalités, est libérée par la Résistance : l’Armée secrète avait organisé l’opération. Raymond Boucharel a mené l’assaut avec succès, avec la complicité de certains gardiens.
Il fait le récit d’un incident lors d’une opération de ravitaillement pour le compte de la Brigade Rac : une maison appartenant à un amiral britannique a été pillée par des Résistants. L’homme qui commandait le groupe a été jugé, puis condamné à mort.
Louis Le Cam souligne également les différences de point de vue tactique entre Armée secrète et Francs-tireurs et partisans. Il signale également des accrochages entre mouvements de Résistance : un groupe FTP ayant connaissance d’un parachutage à Saint-Martin-du-Pin a tenté de se l’approprier sans résultat.
Avec le 50e Régiment d’infanterie Louis Le Cam et son bataillon sont en mission sur le front de Royan, dans le secteur de Saujon (Charente-Maritime) près de Brie et Breuillet. Au grade d’aspirant FFI il sert dans un groupement tactique (GT) qui emploie différentes armes et engage les meilleures troupes. Il précise qu’il disposait d’un armement de qualité et de l’équipement de l’Armée française. Après la libération de Royan, son unité est cantonnée dans les Deux-Sèvres. Il choisit de ne pas s’engager dans l’Armée française et à sa démobilisation en décembre 1945, il revient à la vie civile.
Il poursuit sa carrière d’enseignant à Nontron jusqu’à sa retraite en 1976.
Nota :
Aviateur avant la défaite de 1940, René Tallet dit « Violette » avait pris la tête d’un maquis à Sarlande (canton de Lanouaille) dès 1942. Il commanda un bataillon de la Brigade Rac, le bataillon Violette.