Très tôt, il s’intéresse à la vie politique alors que son père est anarchiste. C’est par conviction antifasciste qu’il se rapproche des jeunesses communistes auxquelles il adhère à l’âge de seize ans, en 1934. Le contexte international et les évènements nationaux des années 1930 ne sont pas étrangers à son engagement : la montée des régimes autoritaires fascistes en Italie, Allemagne et Espagne préoccupe Marcel Debrouwer, ainsi que la montée des ligues d’extrême droite en France. C’est en février 1934 que ces ligues antiparlementaires organisent à Paris une manifestation produisant des émeutes. Il décrit une menace réelle pour la République, que sa famille a nettement ressentie. Par la suite, l’arrivée du Font populaire en France soulève l’espoir dans le milieu ouvrier : Marcel Debrouwer se souvient de l’ambiance et des nombreux meetings politiques. C’est à cette époque qu’il a souhaité s’engager dans les Brigades internationales afin de venir en aide à la République espagnole : la politique du gouvernement français l’a profondément déçu. Bien que convaincue de la nécessité de cet engagement, sa mère a refusé de voir son fils partir en guerre. Puis, en 1937 il adhère au Parti Communiste Français (PCF). Son père le suivra également dans cette adhésion.
En 1939 il est mobilisé dans une unité des transmissions de l’Armée française. La déclaration de la guerre l’a particulièrement affecté : il espérait que la politique internationale parvienne à apaiser les tensions. Sur le front du nord de la France, il est dirigé en Belgique afin de contenir l’avancée allemande. C’est là qu’il constate la fuite des civils belges vers le sud, créant la confusion sur les routes également empruntées par les militaires. Il se souvient avoir rencontré de nombreux véhicules conduisant des officiers de l’Armée française en repli, alors que des unités continuaient leur marche vers le nord. Arrivé à Waterloo, où son unité devait stationner, le commandement n’est assuré que par un sergent-chef. Mais le repli devient général, jusqu’à Dunkerque en juin 1940 où les forces franco-britanniques sont encerclées. Marcel Debrouwer décrit les conditions de l’évacuation militaire sur la plage de Dunkerque : les soldats français doivent attendre l’évacuation des britanniques – prioritaires – qui sont embarqués sur toutes sortes de navires (militaires, civils, de plaisance, de pêche) dans un port improvisé. Il attend dans les dunes de sable durant quelques jours. Il décrit la désorganisation qui régnait sur la plage : pas ou peu d’officiers, des unités et des hommes laissés à leur sort sans ravitaillement. L’aviation ennemie procédait à des opérations de harcèlement en bombardant et mitraillant la plage : les avions de type « Stucka » bombardaient en piqué en actionnant leur sirène, dans le but de terroriser les hommes au sol. Marcel Debrouwer est finalement embarqué pour l’Angleterre où il débarque à Douvres. Les Français sont ensuite conduits à Plymouth. Il décrit une ambiance particulièrement étonnante : les hommes sont acclamés par la foule, comme s’ils avaient été victorieux. Il embarque pour la Bretagne, où l’accueil y est moins chaleureux : les anciens combattants de 1914-1918 les conspuent. Puis avec un camarade ils regagnent Bordeaux par la voie ferrée. Ils se rendent au siège du commandement où on leur ordonne de se rendre le plus au sud possible, en raison de l’avancée des troupes allemandes. Dans un village, il se souvient avoir entendu le discours du Maréchal Pétain appelant à la fin des hostilités. Puis ils se rendent en train et à pied à Carcassonne, Montpellier, puis Béziers où Marcel Debrouwer se souvient avoir distribué des tracts anti-pétainistes. Dans les Pyrénées-Orientales Marcel Debrouwer est affecté à la surveillance aérienne : mais il n’a jamais constaté le passage d’avions.
Démobilisé en 1941, il ne peut rejoindre sa famille à Berck en zone côtière interdite. Accueilli par de la famille éloignée, il attend durant trois mois avant de retrouver ses parents : il découvre Berck partiellement évacuée de sa population. Afin de mener l’action contre l’occupant sur place, il lui est difficile de trouver du matériel politique : la Résistance est complexe en zone interdite et urbaine. La guérilla et les maquis ne peuvent s’épanouir comme dans les zones rurales, telles la Dordogne, la Creuse ou la Corrèze précise t-il.
Un soir, la Gestapo fait irruption au domicile familial et fouille la maison : un chargeur de révolver ainsi qu’un poste TSF sont trouvés. Conduits à la mairie où sont rassemblées les personnes raflées, lui et son père sont dirigés sur Montreuil-sur-mer. Dirigeant des jeunesses communistes, il est condamné comme individu dangereux pour la sécurité des forces allemandes. À la prison de Loos-lez-Lille (département du Nord) Marcel Debrouwer est au secret pendant trois mois. Puis il est emprisonné quelques mois au fort d’Huy (Belgique) où il envisage une évasion avec quelques camarades, qui ne se réalisera pas. Il est déporté en octobre 1943 au camp de Vught (Hollande, région d’Hertogenbosch ; en Allemand camp d’Herzogenbusch) où il découvre l’univers concentrationnaire : la tenue spéciale des déportés, l’attribution d’un numéro qu’il faut connaître en Allemand, l’appel qui peut durer des heures. Employé à déblayer des dunes, il réalise aussi divers travaux d’électricité. Devant l’avancée des Alliés le camp est évacué en octobre 1944 : entassés à 110 personnes dans un wagon il voyage plusieurs jours vers le camp de Sachsenhausen-Oranienburg (Allemagne).
Nota :
Poche de Dunkerque : fin mai 1940, les armées franco-britanniques avancées en Belgique pour contenir la progression des troupes allemandes sont prises en tenaille par les armées venant des Pays-Bas et des Ardennes et finalement encerclées à Dunkerque. L’amirauté britannique organise une évacuation militaire de grande ampleur permettant en moins de dix jours de rapatrier environ 400 000 hommes en Angleterre.