Il va à l’école primaire de Saint-Georges jusqu’au certificat d’études, puis à l’école professionnelle pendant deux ans. Il entre ensuite dans la vie professionnelle : d’abord dans un atelier de fabrication de lettres pour couronnes mortuaires, puis dans la maçonnerie auprès d’un oncle italien ayant fuit le fascisme et enfin devient apprenti plâtrier chez un artisan qui lui forme une conscience professionnelle aiguë. Il joue également au football dans divers le club de son quartier puis au COPO (Club Olympique Périgueux Ouest ).
René Chouet n’a pas de conscience politique alors bien que son père soit anarcho-syndicaliste. Les évènements de 1934 et 1936 ainsi que la politique internationale lui échappent. Mais il a tout de même l’amour de la patrie, de la République et de la liberté inculqué par ses instituteurs, ainsi qu’une certaine conscience de l’existence d’une classe ouvrière. La déclaration de la guerre et la défaite de l’Armée française l’affectent particulièrement. Sa révolte naît avec l’occupation et la collaboration du Maréchal Pétain. Il est révolté par la Marseillaise oubliée et remplacée par la chanson dédiée au Maréchal : pour répondre à « Maréchal nous voilà ! » il compose « Maréchal halte-là ! » entre décembre 1940 et juin 1941. Le rejet de l’ordre établi se manifeste par les chants (la Marseillaise, l’Internationale), les sifflets et dans la pénombre et surveillées par la police), et des slogans à la craie écris subrepticement sur les murs (René Chouet se fabrique des bâtons de plâtre) : des croix de Lorraine, « Vive de Gaulle », « À bas les Boches », « À mort Pétain ». C’est pour René Chouet une période d’exaltation et de protestation durant laquelle le général de Gaulle est un point de référence.
Après le 11 novembre 1942 et le franchissement de la ligne de démarcation par les forces allemandes, la révolte prend corps. René Chouet et les jeunes de sa génération se manifestent lors des distractions sur les boulevards de Périgueux : ils entravent les soldats allemands (au tir à la carabine, aux autoscooters). Lors d’un chantier de la rue Taillefer, il aperçoit du premier étage deux soldats : il prépare une boule de plâtre qu’il expédie à leurs pieds. Ces réactions d’adolescent peu politisé constituaient des formes de Résistance qui auraient pu le conduire vers de graves ennuis reconnaît-il.
L’un de ses amis, René Toulzat, lui propose de constituer un groupe de trois Résistants pour l’Armée secrète, mais rien ne se produit. Lorsque cet ami est requis aux Chantiers de jeunesse, il lui confie la distribution de journaux clandestins en septembre 1943 : Francs-Tireurs, Combat, Libération, Forces unies de la jeunesse patriotique. René Chouet les distribue auprès de ses amis, notamment au sein de son club de football, le COPO. Il refuse la perspective d’être requis à son tour pour les Chantiers de jeunesse : afin d’y échapper il cherche à entrer dans un maquis, et pour cela se renseigne avec peu de discrétion. Une voisine l’informe qu’un neveu se chargera de le conduire dans un maquis de Saint-Paul-Laroche : le 17 février 1944 un rendez-vous est fixé derrière Monoprix à Périgueux. Pour cela René Chouet s’organise : il demande son salaire à son nouveau patron en lui expliquant son départ au maquis et fait de même chez son coiffeur, puis s’équipe d’effets militaires. C’est devenu un « secret de Polichinelle » dit-il. Deux Feldgendarmes et un homme de la Gestapo l’attendent au niveau de la place Hoche : il s’enfuit mais est vite rattrapé. À la libération, il apprendra que son ancien patron était milicien.
Il est violemment interrogé dans les locaux de la Gestapo, puis est conduit à la prison du 35e Régiment d’artillerie à Périgueux et à Limoges. Là il est rossé de coups durant deux journées puis lui et ses camarades sont transférés au camp de Compiègne. Durant le transport ferroviaire il parvient à rédiger une lettre pour ses parents qu’il glisse par la fenêtre à un passage à niveau. C’est un cheminot qui l’enverra à ses parents accompagnée de quelques lignes.
À Compiègne il découvre la déportation et les discussions politiques des chambrées où se côtoient des hommes de gauches, des conservateurs, des gaullistes, ou encore des communistes. Il y est question d’une victoire future et d’un monde nouveau à construire. Il est marqué par un jeune homme, probablement adhérent au parti communiste, avec qui il a des discussions politiques et philosophiques. Au contact de ces hommes aux opinions politiques différentes, il fait un apprentissage : il parle de ses « universités politiques ». Les communistes, forts de l’expérience des prisons organisent la vie quotidienne du camp : le partage des colis, les rations supplémentaires réservées aux derniers arrivés. René Chouet redécouvre la solidarité qu’il a connue dans son quartier.
Puis ils sont conduits vers une destination inconnue, enfermés à quatre-vingt dans des wagons à bestiaux. Après une évasion, le convoi est arrêté : déshabillés, ils sont entassés nus de cent dix à cent vingt personnes par wagons. Arrivés à Mauthausen après trois jours et deux nuits de transport certains sont morts, d’autres ont perdu la raison.