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De la République espagnole à Buchenwald (1) - Vincent Garcia

Le témoignage

Vincent Garcia (1) - Témoignage intégral
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Vincent Garcia Riestra est né le 20 janvier 1925 en Espagne, à Pola de Siero (Asturies) dans une famille de dix enfants. Son père, Gregorio Garcia Lavilla était ouvrier journalier dans des entreprises de travaux publics et sa mère, Aurea Riestra Morilla, couturière pour le compte de cordonniers. Les conditions économiques sont très difficiles pour sa famille.
Dans les années 1930, la famille vit à Noreña, à quelques kilomètres de Pola de Siero. Le père de Vincent Garcia s’intéressait à la vie politique : il lisait « la Voz de Asturias » et était adhérent à l’UGT (Union générale du travail), syndicat de gauche. Vincent Garcia précise que son père était le seul à être à gauche dans sa famille, très conservatrice. Il se souvient de la révolution de 1934, dont les mineurs avaient pris la tête dans les Asturies : des troupes sont venues mater l’insurrection et de nombreuses personnes ont été emprisonnées. Son père a été interrogé mais n’a pas été inquiété par la police. Puis en 1936, avec la victoire du Front populaire les prisons sont ouvertes et une grande joie gagne la famille Garcia Riestra. Son père prend alors une part active au soutien à la République : il n’est pas au front mais se charge du ravitaillement pour la région. Vincent Garcia raconte comment les troupes de Franco ont pris Oviedo, puis s’y sont concentrées, alors qu’à Gijón la Garde d’assaut (l’équivalent des gardes mobiles) est demeurée fidèle à la République. C’est ainsi que toutes les batailles se sont organisées autour d’Oviedo. Son frère le plus jeune, alors âgé de dix-huit ans, s’est engagé contre les fascistes. Il explique comment les républicains espagnols ont été accusés d’avoir incendié une église : des troupes de Franco, retranchées dans le clocher tiraient régulièrement sur les passants et pour y mettre un terme, les républicains ont incendié le bâtiment.
Après la défaite de la République son père est arrêté le 24 janvier 1938, jugé le 3 février et fusillé le 4 mars de la même année. C’est probablement sur la dénonciation de sa sœur, chez qui il avait trouvé refuge, que Gregorio Garcia a été arrêté par la Garde civile.
Devant l’avancée des troupes de Franco, les femmes et les enfants de la région sont évacués : il est proposé à la mère de Vincent Garcia de diriger ses enfants vers l’Union soviétique, ce qu’elle refuse. Elle préfère se réfugier à Barcelone : c’est à Gijón le 22 septembre 1937 que la famille embarque à bord d’un bateau pour Bordeaux, puis revient sur Barcelone par voie ferroviaire. Vincent est séparé de sa famille (hébergée dans les maisons de réfugiés) et placé dans une école militaire à Sant-Boi, dans la banlieue de Barcelone. Le 22 janvier 1939, il quitte Barcelone devant l’avancée des troupes de Franco et arrive en France le 2 février avec un groupe des Brigades internationales. Lors d’un bombardement, il est blessé par un éclat d’obus. Transporté à l’hôpital du Mans (Sarthe), il fait la connaissance d’une infirmière qui le prend sous sa protection. Elle fait des recherches pour qu’il rejoigne sa famille, réfugiée en Dordogne au centre hospitalier de Lanmary (Antonne-et-Trigonant). Plusieurs familles espagnoles réfugiées y sont installées dans une grange, dans des conditions précaires. Il retrouve sa mère et son frère deux sœurs, et apprend la mort de son père.
En 1940, la défaite française est vécue comme un coup dur. Mais les républicains espagnols ne sont pas surpris : l’intervention militaire des Allemands en Espagne (la Légion Condor) a été envisagée comme la répétition d’une guerre à venir. Puis ils sont conduits à Bourrou, et trouve du travail à Ponchapt dans une exploitation viticole, puis dans une ferme jusqu’en 1941. Il rejoint sa mère, employée à Saint-Hilaire-d’Estissac, et devient commis agricole à Beleymas. C’est à cette époque qu’il noue des contacts avec des Espagnols qui s’organisent clandestinement, et avec les premiers Résistants : à Cadouin il rencontre l’instituteur, Lucien Dutard, qui va en outre l’aider pour son apprentissage du Français. Agent de liaison, il est repéré et prend le maquis début décembre 1943. Mais le 22 décembre, avec six personnes de Cadouin (ainsi que le docteur Nessmann de Sarlat) il est arrêté lors d’une opération de répression en Dordogne sud. Il est conduit à Bergerac, Périgueux puis à Limoges au siège de la Gestapo où il est interrogé. Le 18 janvier 1944 il est dirigé sur le camp de Compiègne, et le 22 janvier il fait partie d’un convoi de 2000 personnes. Il arrive à Buchenwald le 24 janvier 1944.
  • Témoin(s) :
    Garcia Vincent En savoir plus

    Vincent Garcia est né en 1925 à Pola de Siero (Espagne) dans une famille ouvrière comptant dix enfants. Son père, militant de gauche, participe activement au soutien à la République espagnole dès 1936. L'un de ses frères s'engage aux côtés des républicains et son père est arrêté en janvier 1938 puis exécuté. Évacuée vers Barcelone en 1937, sa famille quitte l'Espagne en février 1939. Il arrive seul en France puis rejoint une partie de sa famille réfugiée en Dordogne. Il se rapproche des groupes de Résistants des Francs-tireurs et partisans (FTPF) de la région de Cadouin. Arrêté en décembre 1943, il est interrogé par la Gestapo, puis transféré à Buchenwald (Allemagne) en janvier 1944. Désigné pour travailler à la cuisine, il est intégré à l'organisation clandestine du camp. À la libération de Buchenwald en avril 1945, il regagne la Dordogne où il retrouve une partie de sa famille. En Espagne, son frère engagé auprès des Républicains a disparu, sa sœur et un autre de ses frères ont été emprisonnés.

  • Description :

    Entretien réalisé le 19 juin 2009 à Trélissac. Durée : 1 h 23 min 53 s

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    Voir aussi un document rare sur la Retirada : L'Exode d'un peuple, un film de février 1939 de Louis Llech et Louis Isambert, conservé à l'Institut Jean Vigo de Perpignan. Disponible en ligne sur le site Mémoire filmique du Sud.

  • Sujet(s) :
    Arrestation, Autorité d'occupation, Bombardement, Clandestinité, Évacuation, Fascisme, Francs-tireurs et partisans français (FTPF), Gendarmerie, Militant politique, Mouvement ouvrier, Réfugié de guerre, Syndicat
  • Lieu(x) :
    Antonne-et-Trigonant, Barcelone (Espagne), Belvès, Cadouin, Gijón (Espagne), Lanmary (commune d'Antonne-et-Trigonant), Noreña (Espagne), Oviedo (Espagne), Pola de Siero (Espagne), Sant Boi (Espagne)
  • Evénement(s) :
    Guerre d'Espagne (1936-1939)
  • Personne(s) citée(s) :
    Bellœil Roger (dit Jo), Chapdeville Guillaume, Dutard Lucien, Nessmann Victor
  • Cote :
    14 AV 48-49

Photos

Toutes les pistes audio de ce témoignage

  • Présentation
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    Vincent Garcia est né en Espagne dans les Asturies en 1925 au sein d'une famille de huit enfants. Il parle de la profession de ses parents : son père était ouvrier journalier et sa mère couturière.
  • L'engagement politique et syndical de son père
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    Son père était membre du syndicat UGT et s'était impliqué dans la révolution de 1934 en Espagne, puis aux côtés des Républicains en 1936. Vincent Garcia décrit l'état des forces d'opposition et de répression du mouvement des Républicains dans la région de Noreña où sa famille vit. Le rôle du maire franquiste de Noreña contre les Républicains et la famille Garcia. L'action des mineurs des Asturies dans le mouvement social de 1934 et sa répression.
  • Origine sociale et choix politique de ses parents
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    Il évoque l'origine de ses parents et le soutien moral de Gregorio Garcia Lavilla, son père, au mouvement de 1934.
  • Le Front populaire espagnol (1936)
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    Les souvenirs de Vincent Garcia de l'arrivée du Front populaire en Espagne en 1936, et les conditions économiques et sociales de l'époque. L'élection du Front populaire soulève la joie de la famille Garcia, alors que les prisons sont ouvertes. Vincent Garcia évoque les conditions économiques difficiles de sa famille dans les années 1930. Il évoque la misère et la confiscation par les franquistes de leur maison, leur seul bien. Il relate son retour récent en Espagne, dans cette maison devenue un restaurant. Il mène une réflexion sur la notion de nationalité.
  • La prise d'Oviedo par les Franquistes
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    Vincent Garcia parle de la prise d'Oviedo par la garde civile acquise à Franco, alors que la Garde d'assaut de Gijón soutien la République. La cristallisation du front d'Oviedo. Un exemple de critiques encore vives visant les Républicains (l'incendie d'une église).
  • L'évacuation vers Barcelone
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    Devant l'avancée franquiste les femmes et les enfants sont évacués par bateau de Gijón vers Barcelone, via Bordeaux. Le père de Vincent Garcia resté quant à lui à Gijón, prend la fuite avant d'être arrêté après la dénonciation supposée de sa sœur.
  • La Retirada : de Barcelone à la France
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    De septembre 1937 à janvier 1939 Vincent Garcia, sa mère et quelques-uns de ses frères et sœurs sont à Barcelone. Il est placé dans une école militaire à Sant Boi. Devant l'avancée franquiste, il est évacué, séparé du reste de sa famille. Il passe la frontière française en février 1939, après avoir été blessé par un bombardement. Il est dirigé vers un hôpital au Mans et décrit le rôle déterminant d'une infirmière dans la recherche de sa famille.
  • Du Mans jusqu'à la Dordogne
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    Sa mère et trois de ses frères et sœurs sont à Lanmary (commune d'Antonne-et-Trigonant) où un centre de réfugiés est installé. Il décrit la précarité des conditions d'accueil dans une grange.
  • Ouvrier agricole
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    Vincent Garcia est employé pour les vendanges à Ponchapt. Il décrit les conditions économiques d'emploi des réfugiés espagnols. Il quitte son employeur après un désaccord politique et rejoint sa mère à Saint-Jean d'Estissac.
  • L'entrée en résistance
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    Vincent Garcia noue des contacts avec d'autres Espagnols puis rencontre Lucien Dutard, instituteur à Cadouin et résistant. Il précise les conditions de son arrestation à Cadouin en décembre 1943 et explique comment Lucien Dutard y a échappé. Il est pris avec trente et une autres personnes dont le docteur Nessmann de Sarlat. Il apporte des précisions sur ses premiers contacts avec la Résistance et les organisations clandestines d'Espagnols. Il rejoint les Francs-tireurs et partisans début décembre 1943.
  • Jeanne Vigier
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    Évocation de Jeanne Vigier, figure communiste de la Résistance dans la région de Cadouin. Il souligne le faible armement des FTP.
  • La surveillance des espagnols
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    Vincent Garcia parle de la surveillance des réfugiés espagnols par les autorités françaises. Il précise ses relations avec la gendarmerie. Les autorisations de déplacement (un exemple d'infraction commis par sa mère).
  • La défaite française de juin 1940
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    Vincent Garcia livre son sentiment lorsque la défaite française de juin 1940 est consommée. La perte de la nationalité par les Républicains espagnols et les accords Hitler-Franco.
  • La défaite, le maréchal Pétain
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    Vincent Garcia livre son point de vue concernant l'arrivée du Maréchal Pétain au pouvoir en 1940. Réflexions sur la capitulation et l'armée française.
  • L'apprentissage du Français
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    Vincent Garcia explique comment il a appris le Français, et quel fut le rôle de Lucien Dutard : c'est lors de discussions avec lui dans un café de Cadouin qu'il a maîtrisé la langue.
  • L'accueil des réfugiés en 1939
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    Vincent Garcia différencie l'accueil de la population de celui réservé par l'État français du Maréchal Pétain. Il évoque les organisations d'entraide aux réfugiés espagnols.
  • De l'engagement au sein des FTP à l'arrestation
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    Vincent Garcia évoque le contexte de son intégration aux Francs-tireurs et partisans et émet des hypothèses quant à son arrestation en décembre 1943. Il souligne le rôle d'un commissaire de police espagnol installé à Cadouin, et celui d'un réfugié alsacien, qu'il apercevra dans les locaux de la Gestapo de Limoges. Il précise qu'il a rejoint des guérilleros à Belvès puis rejoint les FTP du secteur Dordogne nord, dirigés par Belloeil. Il ajoute avoir participé au secours porté à la gendarmerie de Beaumont du Périgord, attaquée par les troupes d'occupation.
  • Un soldat allemand abattu à Cadouin
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    Il relate l'affaire d'un soldat allemand tué par la Résistance à Cadouin. Cet évènement a eu pour conséquence de fixer les troupes d'occupation dans la région.
  • Lucien Dutard
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    Vincent Garcia parle du rôle de Lucien Dutard dans la Résistance.
  • De l'arrestation à Buchenwald
    En savoir plus
    Le parcours de Vincent Garcia, de son arrestation jusqu'à son départ pour Buchenwald.