Roger Ranoux parle de Louis Godefroy, ancien des Brigades internationales, délégué de la zone sud auprès de l'inter-région, puis adjoint du commandant FFI de la région militaire 5. Son rôle est de mettre en œuvre dans les départements les directives définies lors de la réunion de Limoges. Trois réunions se sont tenues en Dordogne avec Godefroy dans les sous-secteurs FTP (Dordogne nord, Dordogne sud et Dordogne centre). La guérilla consiste à mener des embuscades visant à harceler l'ennemi. Les consignes principales d'organisation sont les suivantes : ne pas exposer inutilement les maquisards, ni les populations (attaquer loin des centres urbains), avoir une position dominante sur le terrain, assurer la surveillance des ailes, prévoir des itinéraires de replis, et se replier rapidement après l'assaut. Roger Ranoux précise qu'à de rares exceptions, ces consignes ont été appliquées.
Il décrit ensuite l'organisation des FTP, composée d'unités légères fondées sur le groupe (8 hommes). Trois groupes forment un détachement dirigé par trois responsables (effectifs, opérations, technique). Trois détachements forment une compagnie (90 hommes), et trois compagnies forment un bataillon. Le régiment est formé quant à lui de trois bataillons. D'autre part, le territoire est organisé en trois sous-secteurs, et au niveau départemental la direction est assurée par trois commissaires (aux effectifs, aux opérations et technique). Les troupes étaient par sécurité disséminées sur le territoire. Puis Roger Ranoux explique qu'il était imposé de ne pas avoir plus d'un détachement par canton. Il évoque une exception dans cette organisation, lors de la libération de la prison de Bergerac. Les prisonniers évadés ont été recueillis par un groupe de Résistants de la Double, qui a subi un assaut de l'ennemi après l'infiltration d'un petit groupe d'Allemands. Puis il ajoute que l'interdiction de tenir une position défensive était l'une des consignes donnée par la direction des FTP. Il souligne que l'organisation militaire des FTP correspondait au combat à mener, et que l'école des cadres de Fanlac avait préparé les hommes à cela.
Roger Ranoux précise que la population était un facteur pris en compte dans les opérations des FTP, afin qu'elle ne subisse pas de représailles. Il souligne également que l'objectif n'était pas seulement stratégique mais aussi politique : il s'agissait de ne pas couper les liens entre population et Résistance. Il explique que terroriser la population afin de la désolidariser du maquis était l'un des objectifs, avec la répression des Juifs, de la division Brehmer, lors de son passage en Dordogne en mars 1944. C'est à cette occasion que les boulangers ont payé lourdement leur soutien à la Résistance (à Tranche, commune de Terrasson et Coly). Il parle du travail de recherche de Jean Besse sur le rôle de la population en Montignacois. Roger Ranoux souligne le rôle déterminant de la population dans son soutien, par son silence notamment : sans aide de la population, la Résistance n'aurait pu se développer selon lui.
Roger Ranoux parle de la peur des Résistants, de l'obligation de la dominer et d'avoir l'esprit en éveil. Il évoque à ce sujet les Géorgiens combattants de la Résistance, fébriles avant un combat mais maîtres d'eux-mêmes lors de l’action.
Roger Ranoux apporte des précisions sur les grades : avant la libération du département, les FTP ne donnaient pas de grade, mais plutôt un titre correspondant à une fonction. Puis il explique que les compagnies, bataillons et régiment étaient désignés par des chiffres. Les deux premiers correspondaient au département (le 22 pour la Dordogne), puis le troisième chiffre correspondait à la chronologie dans la formation des unités (221e compagnie dans le Terrassonnais, la première historiquement). Pour les grades, les étrangers conservaient toutefois leur ancien grade de leur armée d'origine.
Compte tenu des mouvements fréquents des responsables et des groupes, des boîtes aux lettres étaient désignées pour avoir connaissance des déplacements. Il s'agissait de personnes de grande confiance. Roger Ranoux parle à ce sujet de l'infiltration d'un groupe de la région du Bugue, ce qui a provoqué des arrestations. Il précise qu'il existait des boîtes aux lettres départementales, destinées aux dirigeants.
Puis il souligne le rôle déterminant des légaux, fournissant les bases de l'organisation clandestine des FTP. Il parle de ces hommes et femmes qui, avant la déclaration de guerre, étaient engagés dans la lutte contre le fascisme et le nazisme. Organisés en groupes de Résistance armés, ils agissaient la nuit et continuaient leur activité professionnelle le jour. Roger Ranoux parle des légaux de Terrasson, dont le premier groupe prend le nom de Pierre Rebière, originaire de Villac et engagé dans les Brigades internationales. Roger Ranoux parle d'un repas de Noël 1943, organisé à Tranche (commune de Terrasson) et rassemblant tous les légaux de Terrasson, qu'ils appartiennent à l'Armée secrète comme aux FTP. Il évoque le rôle de la famille Teyssou de Coly.
Roger Ranoux précise que les grades militaires sont apparus après le débarquement des forces alliées, sur les directives du gouvernement provisoire de la République. Ils correspondaient à la réalité du commandement. Puis il parle de la formation des régiments des Forces française de l'intérieur.
Il précise également que la durée de vie des dirigeants FTP au niveau départemental a été très courte, de l'ordre de quelques mois. Tout d’abords hébergés en zone urbaine, ils étaient facilement repérés puis arrêtés. Il en dresse la liste : le premier responsable était Lerouge (dit Leblanc) arrêté fin 1943 ; Albert Thomas qui lui succède est arrêté en janvier 1944 à Périgueux ; il est remplacé par Paul Marion, arrêté à son tour et remplacé par Bonnetot, arrêté quant à lui en avril 1944 à Limoges. Roger Ranoux décrit comment ce dernier parvient à s'échapper. Puis Jean-Baptiste Delord tombe au combat à Thenon lors du passage de la division Brehmer. Puis Roger Hassan, responsable des parachutages, est arrêté dans la même période. Pierre Lanxade, représentant des FTP à l'État-major FFI est tombé très tôt lui aussi. Roger Ranoux précise qu'il en a été de même pour les responsables de la réunion de Limoges de février 1944. Après ces arrestations, il a été décidé que par sécurité, les dirigeants seraient avec les hommes du maquis, dans les bois. Le silence complice de la population est à nouveau mis à l'honneur.
Roger Ranoux parle de deux hommes infiltrés dans un groupe, qui ont causé l'arrestation de Thomas. Signalés dans un café de La Douze, Roger Ranoux part à leur rencontre. Il décrit comment, par astuce, ils parviennent à les faire parler. Grâce aux informations obtenues ils informeront les groupes clandestins et les légaux de l’imminence d’une opération de répression (celle menée par la division Brehmer). Puis Roger Ranoux évoque l'organisation et les buts de cette division.